À Parlons-Y Vélo, le vélo est la solution principale pour nos déplacements. Pour autant, on doit bien souvent aller au delà de 10 km. En bons pragmatiques engagés pour des trajets décarbonés, nous sommes fondamentalement multimodaux. Notre allié préféré c’est le train. Il permet bien souvent l’emport du vélo, ce qui facilite les premiers et les derniers kilomètres du trajet. À long terme, un projet de RER est inscrit au PDU de notre belle métropole, et on s’en réjouit. Toutefois 2035, pour une offre complète et attractive, c’est loin! Heureusement, on pourrait dès maintenant permettre un couple vélo+train fonctionnel avec la desserte ferroviaire actuelle… (et un peu de bonne volonté politique ? 😉 )
De l’État à la Métropole, le RER fait consensus.
Le 27 novembre 2022, lors d’un live Youtube, le président de la République a déclaré son intention de développer 10 réseaux de « RER métropolitains » dans les grandes agglomérations françaises. Les élus métropolitains ont immédiatement réagi en faveur de cette annonce, et le 2 décembre, les élus de l’aire grenobloise, au sens large (députés, présidents d’intercommunalités, sénateurs…), ont remis publiquement un « plaidoyer en faveur du RER grenoblois » au président de la République. Ce document, signé par 150 acteurs économiques et appuyé par une pétition signée par 1500 citoyens fin de décembre 2022, a été remis au Conseil d’orientation des infrastructures pour appuyer la nécessité de ce projet ferroviaire. Il détaille les investissements à mener pour garantir un train toutes les 15 minutes entre Brignoud et Rives, et un train par demi-heure vers Clelles et St-Marcellin depuis le cœur métropolitain. Ce plaidoyer regroupe des mouvements politiques souvent en désaccord sur d’autres questions de mobilité (comme pour la liaison cyclable entre Grenoble et Fontaine ou le transport par câble). Le caractère transpartisan montre un consensus large sur le projet du RER Grenoblois.
Un projet inscrit au PDU2030… réalisé horizon 2035 ?
L’annonce présidentielle a permis de remettre sur le dessus de la pile un projet déjà très détaillé dans le PDU2030. Dès son approbation en 2019, la mise en œuvre du volet RER est présentée comme « la colonne vertébrale des mobilités de l’aire grenobloise ». PDU oblige, il est déjà en partie chiffré : les investissements sont estimés à 1 milliard d’euros, en trois volets :
- renforcer les infrastructures,
- augmenter le cadencement sur les lignes,
- augmenter l’amplitude horaire.
La partie la plus facile à faire est prévue en 2027, et concerne la mise en place d’infrastructures ferroviaires nécessaires à une fréquence de 15 minutes entre Grenoble et la gare de Brignoud. Il faudra attendre 2035 (voire au-delà) pour disposer de l’offre complète : une liaison entre Rives et Brignoud cadencée au quart d’heure, et un train à la demi-heure entre Grenoble et Clelles via une modernisation complète de la ligne des Alpes. Entre Gières et St-Marcellin, la cadence à la demi-heure existe déjà à l’heure de pointe. Aucune nouvelle ligne ou réouverture de voie ferrée n’est envisagée actuellement. Il faut toutefois augmenter l’offre en heures creuses et l’étendre en soirée (les derniers trains périurbains partent aujourd’hui à 20h10 et 19h39 respectivement de Grenoble et Saint-Marcellin le soir). La mise en œuvre de ce projet sera donc longue et couteuse. Elle sera surtout difficile à gouverner vu le nombre d’acteurs impliqués. Malgré l’engouement politique actuel, un RER Grenoblois performant dès 2035 reste incertain.
Train+Vélo : pourquoi attendre ?
Comme nos confrères de l’ADTC – Se déplacer autrement, nous pensons que sans attendre la mise en place de la desserte complète qui est promise, il est possible de valoriser le train périurbain dès maintenant. La force de ce projet est qu’il s’appuie sur un réseau déjà existant, certes perfectible, mais qui dispose déjà d’une offre intéressante, en heure de pointe notamment. Entre Grenoble et Moirans, il y a ainsi 7 trains par heure en période de pointe. Le vélo complète à merveille le transport ferroviaire dans les espaces périurbains ou ruraux. Il permet en effet d’assurer les premiers ou les derniers kilomètres depuis ou vers la gare, là où une solution de rabattement collective (bus) est plus complexe à mettre en œuvre en raison d’un habitat moins dense et plus dispersé. Il est intéressant de constater que selon l’Agence d’urbanisme de la région grenobloise, aujourd’hui 12% des usagers en moyenne se rendent à vélo à la gare pour prendre un train dans la région grenobloise. Pourtant, « 68 % des trajets de rabattement et diffusion réalisés en voiture, font moins de 3km ». Le potentiel du vélo est donc loin d’atteindre son plafond maximal.
Le déficit d’infrastructures cyclables sécurisées et confortables pour desservir les gares est un des freins principaux au combo vélo+train pour l’usager du quotidien, tout comme le manque de stationnement sécurisé, permettant de laisser son vélo pour la journée. Favoriser l’usage du VAE nécessite aussi des services dédiés, comme un stationnement permettant de recharger son vélo.
On notera que toutes les communes équipées d’une gare et situées dans les aires périurbaines et rurales du bassin d’attractivité grenoblois ont été sanctionnées par les usagers lors de la dernière éditions du baromètre des villes cyclables. Aucune d’entre elles ne propose un service de location de vélo, ou une offre en libre-service, à proximité des gares. Développer les infrastructures sécurisées, le stationnement et les services vélo en gare sont des pistes pour inciter dès aujourd’hui à l’utilisation du train pour nos déplacements dans la grande région urbaine grenobloise.
Vélo et RER: duo gagnant contre la dépendance à la voiture
L’affirmation du vélo comme moyen de déplacement en appui de l’arrivée du RER permettrait ainsi de modifier de manière vertueuse les comportements en matière de mobilité. Pour être viable et utilisé à son plein potentiel, le RER a tout à gagner des usagers qui ne viennent pas en voiture. Les place de stationnement sont très couteuses en espace et la plupart des parkings sont déjà saturés aujourd’hui. L’augmentation de sa fréquentation doit avant tout être pensée dans une logique de rabattement à pied et à vélo aux gares du réseau. Inversement, la pratique du vélo gagnera en légitimité grâce au développement du RER : il peut assurer le rabattement vers les gares et les trajets de petite distances dans les espaces moins denses, tandis que les trajets plus importants pourront être réalisés pour partie en train. Les habitants bénéficieraient ainsi des bénéfices du vélo (activité physique, cout faible, flexibilité du mode individuel) et du train (rapidité, confort, cout maitrisé des abonnements par rapport à l’essence). C’est en étant conjugués ensemble que vélo et RER permettront de réduire la dépendance à la voiture dans les zones périurbaines et rurales de la Grande région grenobloise.
Quant à savoir s’il faut emporter ou non son vélo dans le train, nous estimons qu’il n’y a pas de solution unique. Aujourd’hui, deux tiers des trajets train+vélo sont réalisés avec le vélo embarqué dans les rames (enquête TER AURG, 2021). Cette situation atteint aujourd’hui ses limites : sur la liaison Grenoble-Moirans par exemple, le nombre de vélos est parfois trois fois supérieur au nombre d’emplacements disponibles dans les trains. Est-ce que les usagers ont besoin de leur vélo à l’arrivée ou bien ont-ils peur de ne pas le retrouver le soir au retour ? Améliorer les solutions de stationnement et les services vélo en gare reste une première approche nécessaire, avant de réfléchir à des contraintes mises sur l’emport des vélos aux heures de pointe.